Accueil > Presse > Underground Magazine: pour l’amour du Rap indépendant
Source: Krisstoff, Encyclorapologique, 2012.
La 1ère sortie nationale d’Underground Magazine remonte à octobre 2003. Il était accompagné pour l’occasion d’un CD-Rom contenant 200 morceaux de Rap issus de la France entière. Bref historique de cette aventure qui a défendu le Rap indépendant.
Ingénieur du son et animateur au studio 5 As à Charleville-Mézières, Cyril Verglas déborde de projets. Auteur-compositeur, il débute une carrière solo sous le nom d’Angelo et sort son premier disque lorsqu’il vivait à Cholet (49) au début des années 2000. Quelques années plus tard sort un black album Un regard différent sur le monde, réunissant les titres qui n’ont pas été retenus sur l’album officiel. En 2004, Angelo sort un deuxième opus intitulé Prisme.
Parallèlement à ça, Cyril Verglas a un autre rêve: celui de fonder un magazine de Rap. Au début des années 2000, les médias Hip hop connaissent un véritable boom, en particulier ceux défendant une scène rap 100% indépendante des majors. Autant dire une époque révolue.
Cyril Verglas voit grand et travaille dur pour que le projet Underground Mag soit à la hauteur de ses ambitions: une compilation sera jointe au tout premier numéro. Pour ce faire, l’ingénieur du son lance un appel à l’attention des MCs de toute la France et procède à une minutieuse sélection. Seuls les meilleurs morceaux de la scène indépendante seront retenus. Après plusieurs mois d’un travail acharné, un CD-rom de 200 morceaux et 25 vidéo-clips (dont « Les frères Wanted » de Kourtrajmé) est finalisé.
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EMPATHIK feat. MALDONE X (AMMONIAK) - "Cosa 9.3"
[Compilation CD, Underground Mag, 2003]
Tous les grands noms de l'Underground français étaient présents.
C’est en octobre 2003 que sort le tout premier exemplaire du magazine, disponible dans tous les kiosques de France. Pour l’époque, le format magazine papier/compilation est une véritable innovation. Le site internet undergroundmag.com connait un succès national. Et autant dire que la compilation fait des ravages dans l’underground du Rap français. Chez les nouveaux venus, Empathik sort du lot avec son morceau « Cosa 9.3 » en featuring avec Maldone X.
Malheureusement, le combat du Rap indépendant contre les majors fait des victimes, dont Underground Mag qui cesse son activité après une dizaine de numéros vendus à travers tout le pays. La concurrence d’internet, l’appropriation du marché du Rap par les maisons de disques et la station de radio Skyrock ont eu raison des velléités d'indépendance.
Autre raison, celle d'un mouvement Hip hop lorgnant sur les succès commerciaux et où les rappeurs n'hésitent plus à "doubler" ceux qui les soutiennent depuis le début pour des majors. Les projets collectifs et les crews, largement majoritaires dans les années 1990, cèdent peu à peu la place à une multitude de projets individuels, très souvent au profit d'un seul artiste. La bande d'amis est remplacée par le "grand MC" qui consent à inviter les "petits" sur ses projets, non sans parfois monnayer quelques billets.
De plus, alors qu'Underground Mag envoyait un exemplaire gratuit à chacun des artistes présents sur ses compilations, d'autres producteurs incitaient au contraire les participants à en acheter un maximum. Et ceux qui n'en achetaient pas assez... pouvaient dire adieu aux prochains plans mixtape. Il n'était donc pas rare qu'une seule et même personne achète 10 à 50 exemplaires... de sa propre mixtape. Certains indépendants allaient même jusqu'à sélectionner en priorité ceux qui pouvaient leur apporter le plus d'acheteurs potentiels. Exit donc, la sélection par le mérite artistique si chère au mouvement Hip hop. On comprend mieux pourquoi des groupes comme Empathik ont si vivement critiqué dans leurs morceaux ce copinage de circonstance.
Cependant, cette aventure marquera à jamais le paysage du Hip hop français. Encore aujourd'hui, de nombreux amateurs de Hip hop cherchent à acquérir les compilations d'Underground Mag. Une aventure du Rap à l'ancienne qu’il nous fallait rappeler.
